15
Jan
2021

Dans la principauté éclairée de Wiseland, le Prince qui avait lu les philosophes, voulait créer une protection sociale universelle consistant en un revenu de 600 écus versé à tout le monde. Il voulait le financer, soit par une extension de l’impôt sur le revenu déjà existant, soit par un nouvel impôt qui financerait exclusivement ce revenu universel. Son ministre des finances lui ayant objecté le coût excessif de cette proposition il fit appel à Zadig, qui conseilla en d’autres temps le roi de Babylone, pour lui demander de l’aide.

Le Prince : Mon cher Zadig, vous qui avez réglé la dispute entre les adeptes du temple, peut-être pourrez-vous m’aider à résoudre le conflit entre mon Ministre des affaires sociales et mon Ministre des finances au sujet de la mise en place de mon projet de revenu universel.

La proposition de mon Ministre des affaires sociales est de verser tous les mois à tous les citoyens de la principauté un chèque de 600 écus. Ce revenu universel serait financé par un nouvel impôt recouvré par le Ministère des finances. Mais mon Ministre des finances me dit que cela augmenterait de plusieurs centaines de milliards d’écus les dépenses et les recettes du royaume et rendrait notre principauté peu respectable au regard des banquiers des royaumes d’Europe.

Zadig : Mon Prince, puisque votre revenu est universel, il n’est pas nécessaire que ce soit votre Ministère des affaires sociales qui le verse. Le Ministère des affaires sociales est parfaitement compétent pour verser des allocations sous condition de ressources comme le sont la plupart de vos allocations où il faut prendre en compte différents critères personnels (logement, revenu fiscal de référence, composition de la famille...), avant de les attribuer. Mais puisque votre revenu est universel et ne dépend d’aucun critère, il peut être immédiatement versé à tous vos concitoyens par votre Ministère des finances.

Le Prince : Mais, Zadig, vous oubliez une chose. En m’inspirant d’autres royaumes européens, j’ai décidé de simplifier notre impôt sur le revenu qui est maintenant prélevé à la source. Je vais donc reverser à tous ceux qui payent déjà l’impôt sur le revenu un chèque de 600 écus, alors que j’ai supprimé dans l’autre sens le paiement par chèque de l’impôt sur le revenu ?

Zadig : Au contraire, mon Prince, c’est une excellente nouvelle ! J’avais souvenir que vous étiez la dernière principauté d’Europe à ne pas prélever l’impôt à la source, mais j’ignorais que ce n’était plus le cas. Cela change tout : plutôt que de faire un prélèvement et un versement tous les mois au même contribuable, vous allez simplifier énormément les choses. Vous allez faire les deux en même temps sans rien changer à votre projet initial de revenu universel.

Le Prince : Comment sans rien changer ?

Zadig : Puisque c’est le Ministère des finances qui prélève l’impôt et versera le revenu universel, il versera à chacun le revenu universel diminué de l’impôt sur tous les autres revenus. Pour ceux qui n’ont pas d’autres revenus, ce sera un versement de 600 écus. Pour les autres, le Ministère des finances leur versera ou leur prélèvera la différence entre le revenu universel de 600 euros et la nouvelle imposition du revenu.

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06
Avr
2017

J'étais l'invité de RCF (Radio Chrétienne Francophone) ce jeudi matin pour m'exprimer sur le revenu universel et le programme économique de Benoît Hamon :

 

La mesure dont on parle le plus dans le programme de Benoît Hamon, c'est le revenu universel.
"Le revenu universel, c'est l'assurance que quels que soient les accidents de la vie, le revenu d'une personne ne sera jamais inférieur à 600 euros. Et cela de façon automatique, contrairement au RSA ou à la prime d'activité qu'il faut demander. Cette mesure est introduite dans l'impôt sur le revenu. C'est donc à la fois un revenu pour ceux qui n'en ont pas d'autre, mais c'est aussi un travail mieux rémunéré et mieux considéré, qui va par exemple faire passer le salaire minimum net de 1150 euros à 1350 euros sans affecter le salaire brut, c'est à dire sans affecter la compétitivité des entreprises."

Certains contradicteurs affirment que le revenu universel pourrait créer une France d'assistés.
"Elle ne fera pas une France d'assistés car cette mesure est complètement articulée avec les revenus du travail. Si on se contentait de verser ce revenu à ceux qui n'ont pas d'activités sans se poser la question de son raccord avec l'activité économique - avec ce qu'on touche quand on travaille - il y aurait ce risque, mais ce n'est pas le cas. Cette mesure est tout autant une revalorisation du travail qu'une mesure qui rend universel ce qui existait, c'est à dire le RSA."

Reste alors la question du financement.
"En net, elle coûte 35 milliards d'euros. C'est effectivement la mesure la plus coûteuse du programme de Benoît Hamon. Elle est financée à la fois par la réduction des allègements des entreprises, qui sont mal ciblés, mais également par la croissance que va générer la mesure. Elle creusera un peu le déficit au départ, mais en fin de période on revient à un même niveau de déficit, et entre temps, nous aurons créé de la croissance et beaucoup d'emplois".

En termes économiques, Benoît Hamon parie sur la relance de la demande et la hausse des recettes fiscales.
"On va creuser le déficit en début de période. Il n'y a pas de miracles en économie. Mais cela aura des effets positifs sur l'économie dans la mesure où les entreprises ont besoin de plus de demande. Cela va creuser le déficit durant deux ans, on aura un déficit qui repassera au dessus de la barre des 3% (autour de 3,4 / 3,5%), mais la contrepartie, c'est qu'on aura plus de croissance et de création d'emplois, et donc à terme - au bout de 3 ans - on revient à la situation initiale en terme de déficit, mais avec des emplois créés, des revenus plus élevés, et une croissance plus forte."

Côté politique européenne, un sujet a enflammé le dernier débat télévisé, celui des travailleurs détachés.
"Il faut que les travailleurs détachés soient employés dans les mêmes conditions que les travailleurs français. Il faut simplement que quand des travailleurs détachés viennent en France, la législation française soit respectée par les entreprises qui les emploient".

Et en matière de politique familiale?
"Benoît Hamon va d'abord mettre en place les allocations familiales dès le premier enfant, car il n'y a aucune raison de traiter les enfants différemment. On va également ouvrir la possibilité d'individualiser l'impôt pour les couples. Ceux-ci auront donc le choix entre l'individualisation de l'impôt ou l'imposition conjugale. Et comme on réforme profondément la prime d'activité - qui va disparaître et être remplacée par le revenu universel - pour les personnes qui ont des faibles revenus et qui touchent le RSA, la conception familiale qu'on introduit est celle de l'impôt sur le revenu. Vous savez que pour le RSA, la conception actuelle de la famille est que le conjoint ne compte que pour une demi-part. Dans l'impôt sur le revenu, le conjoint compte évidemment pour une part, et c'est ce que nous allons mettre en place. Cela aboutira à un résultat important : aujourd'hui la prime d'activité (qui est relativement importante si on la demande) est de 130 euros quand vous avez un salaire au SMIC. Si vous êtes deux célibataires, vous touchez chacun cette aide si vous la demandez, mais si vous vous mariez, vous ne les touchez plus ! Avec notre réforme, un salarié au smic touchera 200 euros de salaire net, qu'il soit célibataire ou marié.

Justement vous parlez de mariage... certains candidats parlent d'abroger ou de réécrire la loi Taubira ?
"Cette loi est une grande avancée vers l'égalité, je pense que personne ne reviendra dessus, la question ne se posera pas. En revanche il faut ouvrir la PMA aux femmes seules, pour des raisons d'égalité. Mais sur tous ces sujets, l'important est de laisser le débat démocratique se développer, car on voit bien à travers ces grands débats de société qu'ils ne recoupent pas les clivages politiques traditionnels, et que chacun s'exprime en fonction de ses propres convictions - et c'est le rôle des parlementaires de le faire".

29
Nov
2016

François Fillon prends toujours beaucoup de liberté avec les faits et avec l'histoire. Contrairement à ce qui fut asséné tout au long de la primaire de droite, s'appuyant sur la durée du travail des seuls salariés à temps complet, la France est, parmi les pays développés d'Europe, celui qui a la plus longue durée hebdomadaire du travail en moyenne : 37,3 heures en 2014 pour l'ensemble des actifs selon l'OCDE contre 36,7 au Royaume Uni, 35,3 heures en Allemagne, 34,7 en Suisse, 33,5 heures au Danemark et 30,1 heures aux Pays Bas, champions du temps partiel. C'est d'ailleurs en général dans les pays européens ayant le temps de travail le plus faible que le taux de chômage y est le plus bas.

Les 35 heures n'ont pas détruit des emplois mais en ont au contraire créé 350 000 entre 1998 et 2000, sans dégrader ni la profitabilité des entreprises ni la compétitivité, comme l'établit l'étude publiée par la Dares du ministère du travail en 2004, époque où le ministre du travail s'appelait ... François Fillon. Le coût net a été de 2,5 Milliards d'euros pour les finances publiques, selon l'évaluation de la commission d'enquête parlementaire sur les 35 heures, soit 12 800 euros par emploi créé. Ce coût net est 3 fois inférieur à celui d'un allègement de cotisation sur les bas salaires et sans comparaison avec le coût des 41 milliards d'allègements de toute nature qui composent le pacte dit de « responsabilité ».

Mais surtout, toute l'histoire du développement économique depuis la révolution industrielle est une augmentation continue de la productivité du travail conjuguée à une baisse tout aussi continue de la durée annuelle du travail. On produit en une heure de travail 20 fois plus qu'en 1870 et on travaille 2 fois moins longtemps. C'est aussi dans les pays les plus développés que la durée hebdomadaire du travail y est la plus faible et dans les moins développés qu'elle est la plus longue : moins de 35 heures en Europe du Nord, plus de 40 heures dans l'Est de l'Europe et près de 50 heures en Turquie.

La tendance séculaire à la réduction de la durée annuelle du travail est appelée à se poursuivre à long terme dans notre pays comme dans tous les autres, même si l'apôtre du conservatisme Fillon rêve d'inverser le cours du progrès et de faire entrer notre pays dans l'avenir à reculons.

Dans la suite de cette note 5 faits statistiques, tirées des sources officielles : OCDE pour les comparaisons internationales, INSEE pour les données françaises qui contredisent les propos de François Fillon et le discours simpliste de la droite sur le temps de travail.

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29
Juil
2016

Après plusieurs mois de tensions sociales sans précédent pour un gouvernement issu de la gauche, la « loi travail » a été définitivement « adoptée » par un nouveau recours au 49.3. Avec 60 autres députés de gauche, j'ai signé la saisine du conseil constitutionnel qui conteste une loi dont la confection « a révélé de graves négligences en matière de dialogue social et de respect du rôle du parlement ».

(Voir la saisine dans http://www.lesechos.fr/politique-societe/politique/0211156445259-loi-travail-la-gauche-de-la-gauche-saisit-le-conseil-constitutionnel-2016736.php)

Sur le fond, cette loi qui n'a de majorité ni dans l'opinion, ni parmi les syndicats, ni au Parlement, restera une erreur économique et politique, comme je le rappelle dans la suite de cette note qui prolonge et développe la brève intervention que j'ai faite le seul jour où les 2 premiers articles de cette loi ont été débattus dans l'hémicycle... le 6 mai !

C'est une erreur économique directement inspirée de l'idéologie libérale dominante en Europe.

Elle repose en effet sur 2 idées fausses. La première, c'est de croire que la protection de l'emploi serait la cause du chômage, alors que celui-ci résulte d'abord des politiques macro-économiques inadaptées conduites en Europe depuis plusieurs années et dont nous sommes heureusement en train de sortir lentement. En matière de protection de l'emploi, le seul résultat bien établi par une écrasante majorité d'études empiriques sur ce sujet, y compris par l'OCDE, peu suspecte dans ce domaine, c'est qu'il n'y a, je cite, « aucune preuve empirique d'un impact de la protection de l'emploi sur le chômage ».

Il suffit d'ailleurs d'observer le cas de l'Allemagne pour s'en convaincre. C'est le pays européen qui a l'une des plus fortes protections de l'emploi en CDI et l'un plus faible taux de chômage. Le seul impact d'un coût élevé des licenciements est de limiter les destructions d'emploi lors des récessions et cela est compensé par le fait que l'emploi ré-augmente moins vite dans les phases d'expansion en raison de la résorption des sureffectifs accumulés lors de la récession. Le cas de l'Espagne illustre parfaitement ce que produirait la baisse forte des coûts des licenciements. 0n cite les 700 000 emplois créés l'an dernier avec la reprise économique en oubliant les 3,7 millions d'emplois détruits dans la crise. L'Espagne est en effet le seul pays européen où la baisse de l'emploi a été plus forte pendant la crise que la baisse de la production, alors que dans tous les autres pays la protection de l'emploi a amorti l'impact de la récession. L'Allemagne a même totalement amorti l'impact de la récession sur l'emploi en utilisant la réduction du temps de travail et le « kurzarbeit ».

La seconde erreur est de croire qu'on peut s'en remettre à la seule négociation d'entreprise en inversant la hiérarchie des normes et en réservant aux branches un rôle accessoire, alors que celles-ci sont essentielles pour que la concurrence ne tire pas les salaires et les conditions de travail vers le bas.

L'article 2 de la Loi travail met à bas toute l'architecture de notre droit du travail, élaboré depuis le Front Populaire et fondé sur le principe de faveur. C'est un reniement pour Manuel Valls qui en juin 2015, signait la motion majoritaire du congrès de Poitiers qui énonçait : « il faut rétablir la hiérarchie des normes. Si la Loi peut permettre à des accords de déroger à ces dispositions, elle ne peut le prévoir dans les domaines relevant de l'ordre public social : salaire minimum, durée légale du travail, droit du licenciement, représentation du personnel.»

Cette inversion est une importation directe de l'idéologie qui a conduit l'Europe au bord de la déflation. Faute d'avoir pu réorienter l'Europe et réduire nos déficits, le gouvernement a choisi comme beaucoup d'autres pays européens d'importer des réformes dites structurelles qui sont simplement comme le rappelait Stiglitz des régressions sociales. Dans le contexte de déflation rampante qui caractérise encore l'Europe, c'est une absurdité économique.

Pour une entreprise comme pour un Etat Il y a deux façons d'ajuster sa compétitivité : par le bas en baissant par exemple la rémunération des heures supplémentaires ou par le haut en investissant dans l'innovation économique et sociale. Pendant 50 ans, l'Europe, se souvenant des déflations calamiteuses des années 30, s'était interdit de reproduire des ajustements vers le bas. Mais c'est malheureusement ce qu'elle a fait au cours de ce que j'appelle la grande récession de 2012-2014, par un cocktail de politique économique fait de coupes dans les dépenses publiques et de réduction du coût du travail dont le résultat a été trois années de récession et une situation de quasi déflation.

Cette inversion de la hiérarchie des normes est combattue par tous les syndicats autres que la CFTC et la CFDT. Et ce n'est pas rendre service aux petites entreprises qui n'ont ni le temps ni la capacité à produire de la norme sociale, mais ont besoin comme tous les acteurs économiques d'un ordre public de branche, comme l'a rappelé très clairement le secrétaire général de l'UPA lors de son audition par la commission des affaires sociales.

J'en viens à l'aspect politique. Proposer à un an d'élections présidentielles un texte très majoritairement rejeté par nos concitoyens qui ne sert à rien d'un point de vue économique, mais remet en cause ce que nous à gauche défendons depuis toujours en divisant profondément le PS et le mouvement syndical, c'est tout simplement suicidaire.

Quant au fait que cette réforme soit profondément rejetée par nos concitoyens, la raison en été clairement énoncée par François Hollande, alors premier secrétaire du PS en avril 2008 lors d'un débat sur le thème « réformer la France, mission impossible ». J'ai un souvenir très précis de cette période car j'avais travaillé avec le 1er secrétaire de l'époque à sa contribution au congrès de Reims. Et je me souviens très bien de ce qu'il disait en avril 2008 sur la méthode de la réforme :

« Il n'est pas possible de mobiliser pour la réforme si on ne propose pas un projet de société. Ce qui fonde le projet de société, c'est le moment de la campagne présidentielle où le candidat affirme son projet et reçoit du suffrage universel l'autorisation de le traduire. Sans projet de société, les réformes arrivent comme des incongruités auxquelles on ne peut adhérer »

Cette « incongruité » ouvre un boulevard à la droite qui avait commencé timidement à démanteler le droit du travail et les 35 heures... et qui, comme le montre le texte voté par le sénat, n'hésitera pas à s'engouffrer dans la brèche que nous avons ouverte.

17
Mai
2016

La loi travail avait mal commencé, avec un avant-projet n'ayant jamais fait l'objet de concertation avec les syndicats. Avec ce recours à ce « déni de démocratie » qu'est le 49.3 – selon l'expression de François Hollande en 2006 –, le gouvernement prive nos concitoyens du nécessaire débat démocratique auxquels ils ont droit, laissant notre pays s'enliser dans une période de tension sociale sans précédent sous un gouvernement « de gauche ».

Comme je l'ai indiqué dans mon interventions lors de la seule journée de débat – sans vote – sur la loi de travail, celle-ci comportait des avancées (le compte personnel d'activité) mais aussi de nombreuses régressions sociales, en contradiction avec les engagements pris par le Parti socialiste non seulement dans son histoire, mais aussi dans son dernier congrès de juin 2015, où la motion majoritaire signée par Manuel Valls excluait toute « inversion de la hiérarchie des normes ».

On pouvait espérer que le débat parlementaire permettrait, avec les amendements longuement préparés par les députés, d'aboutir à un texte acceptable par la majorité de gauche de notre assemblée et susceptible de mettre fin au conflit social. Les amendements que j'avais cosignés prévoyaient notamment de rétablir la hiérarchie des normes, tout en permettant un développement important de la négociation d'entreprise. En passant en force, le gouvernement laisse se développer une situation calamiteuse pour notre pays dont il ne sait pas lui-même où elle peut conduire.

Le 49.3 n'est pas acceptable. Il n'a jamais été utilisé pendant les 5 années du gouvernement de Lionel Jospin. Quand des mesures nouvelles non prévues dans le programme électoral étaient proposées, comme cela arrive à tout gouvernement, elles étaient discutées longuement avec les acteurs concernés et avec la majorité qui, jusqu'au bout, a rassemblé toute la gauche.

Fallait-il pour autant signer une motion de censure de gauche ?

J'ai l'habitude de voter contre les textes qui ne me conviennent pas et j'aurais voté contre la loi travail si rien ne bougeait au cours du débat, notamment sur l'article 2. Mais voter une motion de censure a un tout autre sens. Il ne s'agit plus de voter contre une loi mais contre un gouvernement. Le dépôt d'une telle motion de censure n'aurait pas empêché l'adoption de la loi, car les raisons pour lesquelles la droite d'un côté, et une partie de la gauche de l'autre, souhaitaient censurer le gouvernement étaient strictement opposées. Son seul effet aurait été de diviser un peu plus le parti socialiste.

Les manifestations sont légitimes, mais les violences à l'égard des personnes et des biens sont inacceptables

Le droit de manifester est un droit constitutionnel qu'il convient de défendre y compris dans une situation d'Etat d'urgence. Mais les violences commises par des casseurs à l'égard des forces de l'ordre et des biens sont des délits qui ne sauraient être tolérés. S'en prendre aux permanences de députés ou aux locaux de partis politiques, comme cela s'est produit pour le local du PS à la Croix-Rousse, sont inacceptables dans une démocratie.

06
Mai
2016

Tout en reconnaissant l'avancée que représente le compte personnel d'activité qui repose sur l'idée juste de sécuriser la transition d'un emploi à l'autre dans une économie plus mobile, j'ai critiqué les deux idées fausses empruntées à l'idéologie dominante en Europe qui sous-tendent les mesures de la Loi travail sur les licenciements et la hiérarchie des normes. Il n'y a pas de lien entre protection de l'emploi et chômage, et ouvrir une brèche dans notre modèle social en inversant la hiérarchie des normes risque de tirer notre économie vers le bas.

Ci-dessous, la vidéo de mon intervention et le texte correspondant dans la suite de la note:

 

 

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02
Mai
2016

Tribune publiée dans Libération le 2 mai sous le titre : "La France doit avancer dans une nouvelle voie", avec 8 autres députés.

En ce lendemain de 1er Mai, journée des travailleurs, le projet de loi «travail» est dans toutes les têtes. Il soulève, à nouveau, la question lancinante posée à notre génération : «Devons-nous nous résigner, avec la mondialisation, à faire de l'abaissement des protections sociales l'horizon de nos vies, ou sommes-nous capables de tracer une autre voie ?».

Devons-nous accepter, comme le prévoit actuellement le projet de loi El Khomri, de ne plus considérer les groupes mondiaux comme responsables du sort des salariés de leurs filiales françaises ? L'introduction de critères automatiques transformant les licenciements économiques, jusqu'ici dernier recours, en un mode de gestion courante ? Inverser la hiérarchie des normes, réservant aux branches professionnelles un rôle accessoire, alors qu'elles sont essentielles pour que la concurrence ne tire pas salaires, conditions de travail et investissements vers le bas ? Faire primer l'accord collectif sur les règles plus favorables du contrat de travail ? Affaiblir les syndicats par le recours au référendum pour contourner un désaccord ? Cesser d'exiger que les heures supplémentaires soient vraiment rémunérées en heures supplémentaires, avec pour seul frêle garde-fou l'accord d'entreprise ?

Notre réponse est non ! Aucun lien n'a jamais été sérieusement établi entre niveau de protection des salariés et chômage. Et si l'on ouvre de telles brèches, ce sont, tôt ou tard, les digues qui finiront par céder. Comment pourrions-nous sinon ensuite nous opposer de manière crédible à ceux qui veulent aller plus loin dans la dérégulation - et ils sont légion à droite - si nous mettons nous-mêmes le pied dans la porte ? Il est encore temps de corriger le tir. Un premier pas a été fait en écartant le plafonnement des indemnités prud'homales. D'autres doivent être accomplis.

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26
Fév
2016

La dernière loi sociale du quinquennat devait mettre en œuvre la sécurité professionnelle et la formation tout au long de la vie pour adapter notre droit social à une économie plus mobile. Qu'on simplifie le code du travail, oui ! Qu'on le modernise pour tenir compte d'un monde qui change, oui ! Qu'on donne toute sa place à la négociation sociale pour laquelle j'ai toujours plaidé, évidemment oui ! Mais qu'un texte prétendant donner plus de poids à la négociation collective recopie quasi-intégralement les propositions du MEDEF et aboutisse à une régression sociale que la droite elle-même n'a jamais osé mettre en œuvre ! Non ! Pas nous ! Pas la gauche.

Non seulement cette loi tourne le dos aux valeurs de la gauche, mais, dans le contexte économique actuel, ces mesures sont inefficaces. Dans une période de faible croissance et de stagnation de l'emploi où de nombreuses branches sont encore en sureffectifs, la facilité de licenciement offerte aux entreprises conduira seulement à plus de licenciements sans qu'il en résulte une embauche de plus. Rien ne justifie par ailleurs le plafonnement des indemnités prudhommales pour licenciement abusif.

Qui peut croire qu'augmenter le temps de travail va diminuer le chômage ? Et comment accepter cette incroyable proposition qui permettrait de ne plus payer des heures supplémentaires en heures supplémentaires ? Le résultat sera moins de pouvoir d'achat pour les salariés, et moins d'embauche du fait de la banalisation des heures supplémentaires.

Enfin, la remise en cause de la hiérarchie des normes permettant de déroger à des accords de branche, comme la proposition d'un référendum d'entreprise pour valider des accords minoritaires en contournant les syndicats, sont inacceptables. Comment un gouvernement qui prétendait réhabiliter le dialogue social peut-il à ce point chercher à décrédibiliser les syndicats ?

Ce projet de loi, qui démantèle de nombreuses avancées obtenues autrefois par la gauche, se trompe d'époque : ce n'est pas en revenant à la précarité du travail du XIXème siècle qu'on répond aux défis du XXIème.

16
Déc
2014

La commission d'enquête sur les 35 heures vient de publier son rapport. La rapporteur Barbara Romagnan rappelle que les Lois Aubry ont créé 350 000 emplois entre 1998 et 2000 sans dégrader ni la profitabilité des entreprises ni la compétitivité, pour un coût net de 2,5 Milliards d'euros pour les finances publiques soit 12 800 euros par emploi créé. Ce coût net est 3 fois inférieur à celui d'un allègement de cotisation sur les bas salaires et sans comparaison avec le coût exorbitant des 41 milliards d'allègements de toute nature qui composent le pacte dit de « responsabilité ». Contrairement au « pacte de responsabilité » qui n'est qu'une accumulation d'allègements fiscaux sans contrepartie dans la négociation, les 35 heures sont une sorte de « pacte de responsabilité qui a réussi : en échange d'une baisse de cotisation sociale et d'une plus grande flexibilité, les entreprises ont embauché ». (Interview de Barbara Romagnan : 20minutes.fr : Les 35 heures efficaces contre le chômage, selon un rapport parlementaire)

Il est temps de sortir du débat idéologique pour engager une vraie réflexion sur l'organisation des différents temps de la vie. Tout d'abord et contrairement aux idées 100 fois répétées s'appuyant sur la durée du travail des seuls salariés à temps complet, la France est parmi les pays développés d'Europe ayant la plus longue durée hebdomadaire : 37,5 heures en moyenne en 2013 contre 36,5 au Royaume Uni, 35,3 heures en Allemagne et en Suisse, 33,5 heures au Danemark et 30 heures aux Pays Bas, champions du temps partiel.

Mais surtout, toute l'histoire du développement économique depuis la révolution industrielle est une augmentation continue de la productivité du travail conjuguée à une baisse tout aussi continue de la durée annuelle du travail. On produit en une heure de travail 20 fois plus qu'en 1870 et on travaille 2 fois moins longtemps. C'est aussi dans les pays les plus développés que la durée hebdomadaire du travail y est la plus faible et dans les moins développés qu'elle est la plus longue : moins de 35 heures en Europe du Nord, plus de 40 heures dans l'Est de l'Europe et près de 50 heures en Turquie.

La tendance séculaire à la réduction de la durée annuelle du travail est appelée à se poursuivre. Et la vraie question n'est pas la durée hebdomadaire du travail mais la profonde inégalité entre ceux qui ont un emploi et ceux qui n'en ont pas et la répartition du travail au cours du cycle de vie. Le travail est concentré dans notre pays entre 25 et 55 ans, alors que l'augmentation de la durée de vie appellerait une interpénétration plus forte des différents temps de la vie et non comme aujourd'hui leur succession brutale.

 

Vous trouverez dans la suite de cette note ma contribution à ce rapport.

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10
Déc
2014

Le conseil des Ministres vient d'adopter avec la loi dite Macron une extension du travail dominical faisant passer de 5 à 12 les dérogations possibles au repos dominical.

Lorsque la droite avait envisagé en décembre 2008 d'étendre le droit à l'ouverture des commerces le dimanche, j'avais signé avec 122 députés de gauche une tribune dans Libération pour m'opposer à cette extension.

Lors de la discussion de cette proposition de loi en juillet 2009, je soulignais lors de la discussion générale du texte le mercredi 8 juillet que « dépenser le dimanche le revenu que l'on n'a pas dépensé dans la semaine n'a jamais créé de pouvoir d'achat, ce déplacement de la consommation n'aura qu'un seul effet: développer les grandes surfaces commerciales au détriment du commerce de centre-ville», remettant en cause toute la politique que j'avais conduite à Lyon, lorsque j'étais adjoint au Maire chargé de l'économie, pour préserver le commerce de proximité.

Tout au long du débat jusqu'au vote final, j'ai dénoncé une Loi qui remettait en cause « un droit séculaire, qui plonge ses racines au cœur même de notre civilisation et fonde l'équilibre de notre société : préserver un temps commun pour la vie familiale, associative, sportive, culturelle ou spirituelle » (explication de vote individuelle du vendredi 10 juillet).

Je n'ai pas changé d'avis sur ce sujet. J'espère que le gouvernement réalisera à temps que de nombreux députés socialistes n'accepteront pas plus que moi de voter un texte qu'ils ont fortement combattu quand ils étaient dans l'opposition.

En photo: l'une des affiches du Groupe PS à l'Assemblée en 2009. Vous pouvez lire ci-dessous mes interventions de juillet 2009 sur ce sujet.

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